Manifestation nationale : pourquoi favoriser les suppressions d’emplois et les restructurations ?
Rappelons brièvement le contexte dans lequel nous nous trouvons. Les deux années de pandémie que nous avons traversées ont eu, à travers les confinements, les fermetures obligatoires, les absences du personnel et les quarantaines, un impact sur les chaînes de production des entreprises. La reprise économique post-COVID a ensuite mis la pression sur la reconstitution des stocks et causé des pénuries d’approvisionnement. Enfin, la guerre en Ukraine a aggravé les problèmes d'approvisionnement et les pénuries de matières premières et a fait exploser les coûts de l’énergie. Dans ce contexte, propice aux pressions inflationnistes, l’inflation a grimpé à près de 9% au mois de mai 2022.
Dans ce contexte, la FEB considère la manifestation nationale organisée par les syndicats ce lundi 20 juin comme totalement irresponsable. Leur demande de supprimer la loi sur la norme salariale et donc de faire exploser les coûts salariaux des entreprises est inacceptable. En effet, cela pousserait nos entreprises – déjà confrontées à d’importantes difficultés et qui reportent leurs investissements et le recrutement de personnel - encore plus dans le rouge. Au final, les revendications des syndicats ne favoriseront que des pertes d’emplois, des délocalisations et des restructurations.
Lors de la présentation des prévisions économiques semestrielles de la Banque Nationale il y a quelques jours, les avertissements étaient sans ambiguïté : « le choc des prix élevés de l’énergie est principalement absorbé par les entreprises en Belgique et entraîne une perte de compétitivité » souligne la Banque Nationale. En outre, il a été confirmé une fois de plus que - contrairement à nos pays voisins - le pouvoir d'achat des familles est bien protégé par l’indexation automatique des salaires et des allocations.
Selon les dernières prévisions de la Banque Nationale, l’indexation automatique des salaires entraînerait une hausse des salaires de 5,4% et 5,5% respectivement en 2022 et en 2023. Cela signifie donc une augmentation du coût salarial total de plus de 11% en Belgique, soit près de 5% de plus que ce qui est attendu dans nos trois pays voisins. Cela portera à nouveau notre handicap salarial absolu à environ 16%.
Si, à court terme, l’indexation automatique des salaires assure une bien meilleure protection du pouvoir d’achat en Belgique que dans les pays voisins (+2,0% sur la période 2022-2024) et que le revenu disponible des ménages en termes réels continue même d'augmenter (de +4,5% sur la période 2022-2024), les conséquences pour les entreprises belges par contre, risquent d'être désastreuses.
En effet, les entreprises belges voient leur compétitivité se détériorer rapidement en raison de l’augmentation des prix de l’énergie, de leurs inputs et maintenant des salaires. En conséquence, elles sont contraintes d'augmenter davantage leurs prix que dans les pays voisins pour rester rentables et risquent ainsi de perdre des parts de marché à chaque renégociation de contrat. À moyen terme, les conséquences du dérapage actuel apparaîtront douloureuses : moins de parts de marché, donc moins d’investissements (étrangers), plus de délocalisations et finalement moins d’emplois (d’abord dans l’industrie orientée vers l’exportation mais aussi dans les autres secteurs).
Comme l’exprimait ce lundi Pieter Timmermans, CEO de la FEB, à propos des actions syndicales : « C’est là un bel exemple de politique de l'autruche. Plusieurs instances indépendantes ont confirmé à plusieurs reprises que le pouvoir d’achat des ménages sera préservé grâce à l’indexation automatique des salaires et que les entreprises absorberont l’impact du plus important choc économique externe depuis des décennies. Pourtant, certains partis et syndicats continuent à déformer la vérité et à pousser les entreprises plus loin dans l’abîme. Nous en avons fait l’expérience dans le passé et nous savons ce qui va se passer : des entreprises vont faire faillite, il y aura des restructurations, des entreprises vont quitter notre pays et des gens vont perdre leur emploi. D’où notre appel : pour une fois, ne vous mettez pas la tête dans le sable et entamez la concertation sur un accord tripartite pour répartir les conséquences de ce choc entre les autorités, les citoyens et les entreprises. »