LE BANQUIER JOHAN THIJS (KBC)
Dans Let’s Talk, la FEB vous fixe rendez-vous avec une figure clé du monde entrepreneurial en Belgique chaque dernier jeudi du mois. Qui se cache derrière la femme ou l’homme chef d’entreprise ? Quel est le moteur qui la ou le pousse à faire tourner son activité 24h sur 24, 7j sur 7 ? La passion des chiffres, les gènes, l’ambition… ? Let’s Talk vous propose de découvrir une personnalité du monde du business, devant et derrière les coulisses. Vous entendrez aujourd’hui Johan Thijs. En tant que CEO de KBC, il regarde vers l’avenir, loin devant. Sa vision de la révolution numérique et verte dans le secteur bancaire traditionnel permet à la banque de se libérer de l’emprise du « vieux » monde analogique.
La Harvard Business Review a classé Johan Thijs trois fois de suite dans le top dix des meilleurs CEO du monde. Le numéro 1 de KBC et président de Febelfin, la fédération belge du secteur financier, emporte un prix après l’autre pour son groupe de bancassurance, dont celui de la banque la plus innovante de Belgique. Jusqu’à récemment, il y avait un autocollant sur la porte de son bureau affichant le mot ‘Dare’ (oser) en grosses lettres. Une qualité qu’il met en pratique jour après jour.
Le talent de Johan Thijs s’est révélé très tôt. « Ce garçon doit devenir ingénieur civil », conseillait le PMS à la fin de ses études secondaires. Il a choisi les mathématiques et y a ajouté quelques années d’actuariat. Cette formation lui a montré le pouvoir des données et lui a appris à penser à long terme.
Il peut attendre patiemment sa proie pendant des années, comme dans le cas du rachat de la banque UBB en Bulgarie. Mais faire preuve de patience ne signifie sûrement pas se croiser les bras. Sa biographie est passionnante. On y voit comment, en 15 ans à peine, il est passé d’actuaire chez l’assureur Assuranties van de Belgische Boerenbond à CEO du groupe KBC. Il a ramené KBC dans le peloton de tête après la sombre crise financière. Ainsi, le groupe a gagné pour la sixième fois consécutive l’‘Euromoney’-award de la meilleure banque de Belgique. « Depuis dix ans, notre stratégie est toujours axée sur le service à la clientèle, chaque rouage jouant un rôle important. C’est le fruit du succès d’un grand nombre de personnes et nous en sommes fiers. »
Plus ultra
‘Oser’ est son deuxième prénom et Johan Thijs ‘ose’ aussi sauter, même s’il n’est pas toujours sûr à 100% du résultat. « Mais mon vrai leitmotif, c’est ‘toujours de l’avant, et plus encore’. Ce qui signifie en même temps : ne pas s’attarder sur ce qui a mal tourné ou sur ce qui va bien. »
C’est en partie grâce à cette culture, où l’empowerment va de pair avec l’accountability, que KBC est devenue la success story qu’elle est aujourd’hui. Johan Thijs encourage les managers à permettre à leurs collaborateurs de développer leurs talents, et non à imposer leur vision. « Si l’on veut répondre aux besoins des clients de manière innovante, il faut utiliser les compétences de tous ses collaborateurs. N’imposez pas l’innovation de haut en bas, mais créez un environnement où les gens peuvent faire leur travail. Ainsi, notre département d’innovation ne compte pas 25, mais 42.000 personnes. »
“Culture eats strategy”
Le succès de KBC est intrinsèquement lié à sa culture d’entreprise, PEARL, qui signifie Performance, Empowerment, Accountability, Responsiveness and Local Embeddedness. Le renforcement de cette culture et de cette cohésion est la priorité absolue de Johan Thijs plutôt que la croissance et la rentabilité. « Culture eats strategy for breakfast, affirme le gourou américain du management Peter Drucker. Au départ, ma vision n’a pas été bien accueillie par les analystes. Mais au fil du temps, ils ont dû admettre que la culture d’entreprise est effectivement fondamentale pour la révolution positive que nous avons réalisée au cours de la dernière décennie. »
Écologie
Il s’agit aussi d’une révolution verte. Plus votre dossier est vert, plus votre prêt est bon marché ? « Nous avons déjà dépassé ce stade depuis longtemps. En tant que KBC, nous ne réduisons pas seulement notre propre empreinte écologique interne, mais nous essayons également de réduire l’impact négatif indirect de nos clients sur notre activité, par exemple en ne soutenant plus l’extraction de charbon en République tchèque - où KBC détient une part de marché importante. C’est un point particulièrement sensible pour la réputation de la banque quand on sait combien de familles dépendent du charbon pour leur chauffage ou leurs revenus. » Notre approche ‘verte’ va donc bien plus loin que l’octroi d’une réduction sur un prêt pour un projet écologique.
Digital first
Le modèle ‘digital first’ n’a plus grand-chose à voir avec la satisfaction des besoins financiers dans un monde analogique. Au cours des prochaines années, KBC investira plus de 1,5 milliard EUR dans le nouvel environnement numérique. « Les données sont la nouvelle électricité. Elles changeront aussi fondamentalement notre existence et celle des banques parce que le ‘digital first’ affecte fondamentalement la manière dont la banque fonctionnera de manière durable. »
Nous avons terminé notre entretien par quelques questions ‘sensibles’ à Johan Thijs dans son rôle de président de Febelfin. Sur le sens et le non-sens de la taxe bancaire, par exemple, ou le mythe des milliards parqués passivement sur les livrets d’épargne belges, et surtout sur le dossier symbolique des taux d’intérêt nuls ou négatifs.
“Culture eats strategy for breakfast”
Bloquez dès à présent la date dans votre agenda pour le prochain podcast Let’s Talk de la Fédération des entreprises de Belgique. Notre invité sera Olivier Legrain, CEO d’IBA, l'entreprise néo-louvaniste spécialisée dans la protonthérapie. À écouter le jeudi 27 janvier 2022.