1 an de Brexit : les effets sont tangibles, mais on semble avoir évité le scénario du pire
Un an après la sortie effective des Britanniques du marché unique européen et de l’union douanière, un recul des échanges avec le Royaume-Uni (RU) se dessine. Le nouveau ‘Trade and Cooperation Agreement’ entre l’UE et le RU prévoit un régime « zéro tarifs zéro quotas » pour l’ensemble des produits échangés entre les deux blocs ainsi que diverses nouvelles dispositions en matière de procédures douanières.Il a entraîné des charges administratives ainsi que des retards.Pour l’avenir, les entreprises craignent également de nouveaux problèmes résultant de divergences réglementaires et des contrôles additionnels, comme le montre une enquête de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB) auprès de ses fédérations sectorielles.
Demain, il y aura exactement un an que l’Union européenne et le Royaume-Uni se sont mis d’accord, après des mois de négociations, sur une nouvelle relation commerciale. L’accord commercial et de coopération (Trade and Cooperation Agreement ou TCA), entré en vigueur le 1er janvier 2021, prévoit des tarifs zéro et des quotas zéro pour tous les produits qui respectent les règles d’origine en vigueur. Pour le monde des entreprises belges, c’était une excellente nouvelle, car le Royaume-Uni est un des principaux partenaires commerciaux de notre pays. Néanmoins, l’accord commercial n’offre pas les mêmes avantages qu’une adhésion à l’UE et de nombreuses nouvelles règles et procédures ont été introduites à partir du 1er janvier, notamment en matière de formalités douanières et de contrôles.
Baisse des exportations
Pendant les 9 premiers mois de 2021, les exportations belges dans le monde ont augmenté de 21,8% par rapport à la période correspondante de 2020. Cette forte augmentation va de pair avec la reprise économique enregistrée depuis le début de la pandémie de coronavirus. Toutefois, au cours de la même période, les exportations vers le Royaume-Uni ont reculé de 5%, comme le montrent les chiffres de l’Agence pour le commerce extérieur. Le RU chute ainsi de la quatrième à la cinquième place dans la liste des principaux débouchés de notre économie. C’est surtout au cours des trois premiers mois de 2021 que les exportations belges vers le RU ont été sensiblement plus faibles qu’ailleurs. Le moment de cette baisse, ainsi que le fait que les exportations vers d’autres pays se sont mieux redressées, permettent de conclure que cette baisse s’explique en partie par la sortie du RU du marché unique européen et de l’union douanière à compter du 31 décembre 2020 et par le fait que les entreprises commerçant avec le Royaume-Uni sont confrontées aux nouvelles règles et procédures douanières.
Charges administratives, divergences réglementaires et nouveaux contrôles
L’enquête menée auprès des membres de la FEB montre que les entreprises sont confrontées à des charges administratives supplémentaires à cause de cette nouvelle réalité. Ainsi, elles rencontrent souvent des difficultés lors de la rédaction des documents exigés, comme les déclarations d’exportation et les preuves d’origine préférentielle, nécessaires pour pouvoir exporter vers le RU. Les chargements partiels rencontrent également des problèmes. Les autres difficultés citées sont les formalités et contrôles douaniers, ainsi que les problèmes de mobilité professionnelle. Alors que pendant les premiers mois de l’année – juste après l’entrée en vigueur du TCA – les entreprises devaient encore s’adapter à ces changements, elles ont plutôt souffert pendant la deuxième moitié de l’année d’un manque important de capacité de transport, et ce principalement du côté britannique. De ce fait, elles ont souvent subi des retards de plusieurs heures à plusieurs jours.
De plus, les fédérations sectorielles n’ont pas le sentiment que l’avenir est très rose. Elles sont préoccupées par les divergences réglementaires , telles que les règles pour l’industrie chimique (règlement REACH), la réglementation en matière de brevets, le marquage indiquant que les produits sont conformes aux normes européennes en matière de santé, d’environnement et de sécurité (marquage dit UKCA au lieu de CE) et la législation sur la TVA. Ces règles peuvent donner lieu dans certains cas à de doubles procédures de certification. De plus, elles peuvent fausser les règles du jeu et donner aux acteurs britanniques un avantage concurrentiel. La FEB appelle donc les autorités belges et européennes à suivre la situation scrupuleusement afin de détecter toute distorsion de concurrence.
À partir du 1er janvier, les Britanniques introduiront une nouvelle série de contrôles pour les exportations vers le RU. Ainsi, à partir de cette date, des déclarations de douane complètes seront exigées pour toutes les marchandises. Pour les produits sanitaires et phytosanitaires (SPS), une prénotification sera obligatoire. À partir du 1er juillet 2022, une déclaration de sûreté et de sécurité sera exigée pour les marchandises entrant au RU. Une certification et des contrôles physiques seront aussi introduits pour les produits SPS à partir de cette date. Après avoir déjà subi une année complète de charges administratives, les secteurs craignent que ces contrôles additionnels ne fassent que les alourdir. La FEB invite les entreprises à se préparer à ces nouveaux changements. De plus, elle plaide auprès des autorités britanniques pour une approche pragmatique.
Désamorcer le conflit
« Il n’est évidemment pas étonnant que le Brexit ait eu un impact négatif sur les échanges avec le RU.En effet, le nouvel accord commercial n’est pas la reproduction de l’ancienne situation qui prévoyait la libre circulation des marchandises, des services, des personnes et des capitaux.Cette évolution est confirmée par les premiers chiffres des exportations qui sont en recul, malgré une tendance mondiale positive.Ces chiffres prouvent une nouvelle fois l’importance du marché intérieur européen sans frontières, ni tarifs, ni formalités douanières ! Néanmoins, l’accord commercial a permis de limiter les disruptions majeures vu que la période transitoire de statu quo arrivait à son terme. Ce fut particulièrement bienvenu en cette période où les entreprises sont confrontées à l’impact de la pandémie de COVID-19. Les tensions concernant la pêche et le Protocole sur l’Irlande et l’Irlande du Nord reflètent la nouvelle réalité politique. Nous sommes donc préoccupés par les tensions qui entourent la mise en œuvre de ce Protocole. Il est donc très important que les deux parties tendent vers une solution qui stabilise les relations et évite l’escalade afin que l’accord commercial puisse rester pleinement d’application. Il faut éviter les actions unilatérales »,estime Pieter Timmermans, CEO de la FEB.